L'un des plus grands plaisirs de voyager en Asie du sud-est est de prendre l'autobus. Et quand je parle de prendre le bus, je parle de prendre un vrai bus avec les locaux, le vrai monde.
Avec des véhicules débordant de passagers le plus souvent qu'autrement, l'état parfois catastrophiques des bancs et les surplus de bagages dans l'allée centrale, les bus sont souvent un terreau fertile d'histoires débiles.
Un autre classique des bus asiatiques est la musique. Une version karaoké des vidéos sur un écran miniature à l'avant du bus et le son dans le tapis, souvent beaucoup trop fort pour les excellents haut-parleurs made in China (en fait, on devrait plutôt les appeler haut-gricheurs que haut-parleurs), est la meilleure option pour obtenir le silence des passagers. En fait, mettre un DVD karaoké d'un chanteur populaire dans un bus en Asie du sud-est est l'équivalent de mettre un DVD de Caillou à des enfants de trois ans dans une garderie.
Pour le projet Siem Reap - Battambang, j'ai eu la chance de regarder le DVD des vidéos, version karaoké, d'un des chanteurs les plus populaires de l'heure au Cambodge. Aucune idée de son nom, mais j'entends son tube au moins une fois par jour.
Les Cambodgiens ont beaucoup de très belles qualités, mais pour ce qui est de l'originalité des scénarios des vidéos de musique, on repassera. A côte de ça, les Super Mamies passent pour de la grande télé.
Musicalement, on fait dans la pop très commerciale et très légère à la "je t'aime mon amour et je t'aimerai pour toujours".
Le thème de la chanson étant toujours le même, il ne faut pas vraiment s'étonner que les vidéos soient tous un peu pareils. Mais il y a un peu pareil et un peu pareil.
Changez la fille, les décors, les paroles et vous avez inlassablement le même vidéo encore, encore et encore: un triangle amoureux (deux filles et un gars) et la fille qui "tilt" entre les deux gars, dont le chanteur qui est toujours dans les vidéos. Elle passe 34 secondes avec le premier avant d'en passer 29 avec le deuxième avant de repasser à l'ouest 48 secondes pour mieux repasser à l'est pour quelques rimes. Gauche - droite, gauche - droite pendant 3:30. Un peu agace la madame! Chose certaine, Françoise David n'est pas la réalisatrice de ces vidéos.
Autres éléments qui reviennent d'un vidéo à l'autre: la fille ne finit jamais avec le chanteur, le chanteur est un alcoolo fini et le chanteur est une solide lopette.
Systématiquement, dans chaque vidéo, au moment où Dulcinée est dans les bras du méchant rival, notre ami le chanteur se défonce la gueule à l'alcool. Beaucoup d'alcool et vraiment trop d'alcool... question que l'on comprenne que le gars souffre d'amour.
Donc, après s'être bourré la gueule, notre ami tente systématiquement d'en venir aux poings avec son rival. Une bataille par vidéo, c'est garanti. Des claques sur la gueule, des coups de pied dans les reins. Et on se bat partout: dans la rue, dans la chambre à coucher, dans un bar. Et chaque fois, notre ami le chanteur perd sa rude bataille. Des volées et encore des volées. Une fois, le type se fait mêmeme tirer dans la jambe dans par la fille. Fascinant, captivant et un beau message d'espoir pour les tout-petits à la maison.
Donc, un personnage pathétique et de qui on finit presque par avoir pitié: un homme ultra-rose trop proche de ses sentiments qui a de la pepeine à tout bout de champ, qui est trop mou pour prendre sur lui et qui boit comme un trou pour noyer sa pepeine et qui se bat comme une fillette de 12 ans. Et qui, en plus, est laid comme un singe. Quand tu as la face d'une mante religieuse, t'as pas grand chance de scorer avec les filles dans la vie. Voilà probablement ce qui explique pourquoi la fille ne finit jamais avec lui dans les vidéos.
Mais laid comme un singe ou pas, si le personnage échoue lamentablement avec les filles dans le vidéo, je ne suis pas trop inquiet en revanche pour le chanteur de la vie de tous les jours. À voir comment les filles le regardaient avec de la tite babave dans l'autobus, je n'ai pas l'impression qu'il couche souvent seul le soir.
Peu importe que ces vidéos soient pour le moins mauvais, partout dans le monde, une rock star, ça reste une rock star.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire